Depuis le 1er janvier 2025, une réglementation majeure redessine le paysage immobilier français : les logements classés G, étiquetés "passoires énergétiques", ne peuvent plus être loués. Ce bouleversement impacte directement plus de 600 000 biens, dont une grande partie se situe en Île-de-France, région où se concentrent les cinq villes les plus touchées. Si l'objectif écologique est ambitieux - éliminer 10 % des émissions de gaz à effet de serre produites par le secteur du bâtiment - il représente également une opportunité stratégique pour le secteur bancaire.
Avec un coût moyen de 40 000 euros par logement pour atteindre les normes énergétiques, le besoin de financement se chiffre à 43 milliards d'euros rien que pour les logements classés G, et grimpe à 100 milliards en incluant les biens classés F. Cette équation complexe nécessite une mobilisation conjointe de l'État, des banques et des propriétaires.
Un effort colossal qui nécessite une coopération entre l’État et les banques
Pour encourager la rénovation énergétique, l’État déploie plusieurs dispositifs :
- Réglementation stricte : Les propriétaires qui ne réalisent pas les travaux s'exposent à des sanctions, telles qu'une réduction des loyers ou une suspension des baux.
- Aides financières : À travers MaPrimeRénov’ (budget de 2,3 milliards d'euros pour 2025), l’éco-PTZ ou encore la TVA réduite à 5,5 %, l’État subventionne une partie des coûts.
- Signal prix : L’augmentation des tarifs de l'énergie rend les économies potentielles des rénovations plus attractives.
Cependant, ces aides seules ne suffisent pas. Les banques, en tant que partenaires financiers des propriétaires, ont un rôle clé à jouer dans cette transformation. Elles peuvent notamment proposer des financements dédiés et offrir des services d’accompagnement via des partenariats spécialisés pour guider les clients dans leurs projets de rénovation énergétique.
Pourquoi la rénovation reste-t-elle un défi ?
Malgré ces efforts, les investissements réels restent bien en deçà des besoins. De nombreux propriétaires préfèrent vendre leurs biens plutôt que de les rénover, parfois à perte. Ce paradoxe peut s’expliquer par plusieurs facteurs.
Les dispositifs étatiques présentent plusieurs limites importantes. Tout d'abord, ils manquent de clarté et de stabilité. Par exemple, MaPrimeRénov’ fait actuellement l’objet de vifs débats. Malgré des ambitions élevées, son succès reste en deçà des attentes, avec seulement 2 milliards d’euros consommés sur un budget de 3 milliards en 2024. Le dispositif est également fortement critiqué en raison des fraudes massives constatées, ce qui, combiné à l’absence de budget voté au Parlement, pousse les pouvoirs publics à revoir son enveloppe budgétaire. En 2025, une réduction drastique de 700 millions d’euros est déjà envisagée, marquant un net coup de frein sur ce programme d’aide à la rénovation énergétique.
Par ailleurs, la pénurie d’artisans qualifiés constitue un frein majeur : seules 11 % des entreprises du bâtiment disposent du label RGE (« Reconnu Garant de l’Environnement »), indispensable pour bénéficier des aides mais également complexe et coûteux à obtenir.
Enfin, les économies attendues restent incertaines. Selon France Stratégie, moins de la moitié des logements privés pourraient espérer un retour sur investissement (ROI) positif en moins de 30 ans après des rénovations visant un DPE A. Ce constat décourage les projets ambitieux, pourtant essentiels pour transformer durablement le parc immobilier.
Du côté des offres bancaires, plusieurs défis subsistent également. Les financements proposés restent souvent partiellement adaptés, ne couvrant qu’une partie des besoins en raison de montants ou de durées insuffisants. Ainsi, 50 % des rénovations sont financées sur fonds propres, et les prêts affectés offrent généralement des durées inférieures à 10 ans, alors que le ROI dépasse fréquemment les 20 ans.
En outre, le parcours client manque de fluidité. Malgré les partenariats établis avec des spécialistes de la rénovation, ces derniers ne sont pas toujours bien intégrés dans les parcours bancaires. Le maillage territorial reste inégal, les offres sont peu visibles sur les espaces en ligne des banques, et l’expérience client s’en trouve significativement affectée.
Les banques disposent de leviers à actionner, notamment grâce à l’IA ou la titrisation verte
Pour transformer ces défis en opportunités, les banques disposent de plusieurs pistes stratégiques :
1. Adapter les financements
Proposer des prêts longue durée, bonifiés pour les rénovations ambitieuses, pourrait rendre ces projets plus accessibles. Offrir des taux compétitifs et des durées de remboursement flexibles, accompagnés de garanties adaptées, permettrait de réduire les risques pour les banques tout en encourageant davantage de clients à entreprendre des travaux.
2. Intégrer des parcours clients fluides
Les banques pourraient collaborer avec divers réseaux d’artisans certifiés, sans exclusivité, pour proposer un accompagnement « clé en main », incluant audits énergétiques, devis et suivi des travaux. Elles se positionneraient alors comme un orchestrateur, en proposant l’offre la plus adaptée au besoin client.
3. Exploiter l’intelligence artificielle et la data
Les banques pourraient utiliser les bases de données publiques pour repérer les biens énergivores et proposer aux propriétaires des offres personnalisées et adaptées à leurs besoins. Par ailleurs, les diagnostics de performance énergétique (DPE) manquants peuvent être enrichis à l’aide de modèles prédictifs, permettant de fournir des estimations précises des coûts de rénovation et des gains énergétiques potentiels.
4. Promouvoir la titrisation verte
Transformer les actifs liés à des projets de rénovation en titres négociables sur les marchés financiers permettrait de libérer des ressources pour financer de nouveaux projets, tout en respectant les critères ESG.
En s’impliquant, les banques remplissent également des objectifs vertueux
L’investissement des banques dans la rénovation énergétique présente plusieurs avantages stratégiques à leur niveau :
- Améliorer leurs encours verts : Ces projets contribuent à aligner les portefeuilles de prêts sur les objectifs climatiques.
- Valoriser les garanties : Les logements rénovés voient leur valeur augmenter, renforçant la qualité des actifs sous-jacents.
- Attirer de nouveaux clients : En proposant des solutions complètes et innovantes, les banques peuvent se positionner comme des partenaires incontournables de la transition écologique.
- Réduire les risques : L’engagement dans des projets ESG-compliants diminue l’exposition à des actifs non conformes.
Pour les propriétaires, l’accompagnement bancaire facilite les démarches et réduit le poids financier des travaux. Ils bénéficient également de biens plus performants, valorisés sur le marché immobilier et économes en énergie.
Un rôle stratégique du secteur financier dans la transition énergétique
Les banques ne sont plus de simples financeurs, mais des partenaires essentiels pour la transition énergétique. En s’investissant dans ces projets, elles contribuent à relever un défi majeur tout en créant de nouvelles opportunités de croissance.
La rénovation énergétique, bien que complexe et coûteuse, est une chance pour les banques de renforcer leur position dans un marché en mutation. En proposant des solutions adaptées et en jouant un rôle moteur, elles peuvent transformer un défi en un levier stratégique pour l’avenir.
Sopra Steria se positionne à leurs côtés et joue un rôle clé dans la transition énergétique en mettant son expertise technologique au service des banques et des institutions publiques. Grâce à ses solutions de data analytics et de modèles prédictifs, Sopra Steria permet la construction d’offres personnalisées vers le marché. En repensant et digitalisant les parcours client, Sopra Steria simplifie l'accès aux financements et accélère la rénovation énergétique, contribuant ainsi à une transformation durable du secteur.